À la fin des années 90, prenant la mesure au sein des hôpitaux bruxellois de l’explosion de la multiconvictionnalité, les responsables de l’aumônerie catholique des Cliniques Universitaires St-Luc (CUSL), en accord avec la direction des Cliniques, ont pris la décision de mettre en place, au cœur même des Cliniques, un lieu d’écoute multiconvictionnel basé sur une charte prônant un accueil bienveillant et non prosélyte.
Vingt ans plus tard, pour fêter cette aventure originale, un colloque au titre un tantinet provocant « Au carrefour des convictions : sauver la santé ? » s’est tenu les 9 et 10 mars dernier.
Au carrefour des convictions
Ce colloque a voulu souligner une double question : celle, tout à fait actuelle, de la place de la spiritualité dans les soins de santé. Et, concomitante, celle de la place des convictions philosophiques et religieuses au sein des hôpitaux, lieux paradigmatiques de nos sociétés occidentales.
Illustrant la question de la place possible (souhaitable ?) des philosophies et religions dans notre espace public, ce colloque a été inauguré, le soir du 9 mars, par une conférence à deux voix entre l’homme politique belge et européen bien connu H. Van Rompuy et le philosophe de l’Europe J.M. Ferry : «L’interconvictionnalité, moteur ou obstacle à la démocratie ? ».
Ensuite, la journée du 10 mars a débuté par une conférence concernant l’évolution historique du lien entre spirituel et médecine et les enjeux actuels de celui-ci, présentée par le prof. G. Jobin, théologien de l’Université de Laval (Québec).
Elle a été suivie par une présentation des modes particuliers de positionnements et de fonctionnements des lieux « d’accompagnement spirituels », d’hôpitaux de trois pays différents : ceux des hôpitaux du Canada présentés par le prof. G.Jobin, celui du CHU de Vaud -Suisse, présenté par la théologienne protestante et formatrice C. Odier et celui des CUSL -Belgique, présenté par le prêtre et aumônier, responsable du Carrefour Spirituel, G. Terlinden.
De nombreux ateliers
L’après-midi de cette deuxième journée, des ateliers ont abordé des problématiques liées à l’une ou l’autre des deux questions qui sous-tendaient le colloque. Un panel final en reprenait les questions importantes.
Deux ateliers ont traité chacun de la spiritualité et de l’accompagnement spécifiques aux soins pédiatriques et psychiatriques. Un atelier s’est penché sur les tensions et articulations possibles entre approche psychologique et spirituelle. Un autre sur un outil mis au point dans un hôpital afin de donner place au spirituel dans les échanges pluridisciplinaires. D’autres ont permis des échanges autour de l’ouverture, dans la formation des soignants, d’un espace au spirituel ou sur la question essentielle de savoir s’il était nécessaire d’ajouter le spirituel au modèle bio-psycho-social déjà utilisé en oncologie. Des ateliers ont traité de l’impact possible des convictions affichées sur l’hospitalité, des gestes et rituels proposés comme éventuel soutien à l’humanité du soin. Enfin, last but not least, un atelier était centré sur la figure du Christ en tant que figure spirituelle qui prend soin.
Le colloque s’est clôturé par une pièce de théâtre humoristique « Bonté divine » de F. Lenoir et L.M. Colla, jouée par une troupe amateur.
Le public présent en nombre, aux différents moments, montre assez combien ces sujets peuvent soulever l’intérêt, au-delà même des milieux spécialisés.
Myriam Gosseye