7 clés pour vivre l’Avent par Christian Deduytschaever

Le père Christian Deduytschaever nous propose sept clés pour vivre l’Avent.

Le temps de l’Avent est la période rythmée par 4 dimanches pour nous préparer à fêter profondément Noël. Selon le jour de la semaine où se célèbre Noël, l’Avent dure donc entre 22 et 28 jours avant le 25 décembre. Il est donc très rare qu’il y ait vraiment quatre semaines. En 2020, il commence le 29 novembre.

Cette année justement, ce temps d’attente est très particulier, puisque la pandémie nous plonge dans la réalité d’une attente dont nous ne connaissons pas la durée : aucun délai n’est précisé. « Vous ne savez ni le jour ni l’heure. » Nous sommes ainsi directement invités à ne plus nous fixer sur une date bien connue, mais dans la perspective d’une rencontre annoncée et mystérieuse…Etre sur un qui-vive qui fait vivre ! Cela nous rappelle que l’attente n’est pas celle d’un anniversaire, mais d’une lumière dans nos vies…
En ce sens, on peut aussi parler d’un temps de recherche, la découverte étant alors fêtée à Noël.

Clé 1. Coutumes.

Les calendriers de l’Avent présentent de petites fenêtres qui s’ouvrent jour après jour sur des étapes d’un chemin jalonné de rencontres, d’une progression vers la crèche de Noël, ou parfois de paroles tirées de la Bible. (Le commerce a souvent remplacé tout cela par des friandises.)
La couronne avec quatre bougies allumées progressivement (parfois identifiées à Paix, Amour, Foi et Espérance) est d’origine allemande et veut préparer à la grande fête de la « lumière véritable venue dans le monde » (comme le dit l’évangile : Jean 1,9).
Parfois, d’autres décorations de feuillages et rubans sont accrochées aux portes d’entrée des maisons; on pourrait y voir un signe de bienvenue à Celui qui vient, en écho à Jean 1,11-12 : « Il est venu chez les siens… et à ceux qui l’ont reçu…» et à la fin de l’Apocalypse (22,20) : « Marana tha : Viens, Seigneur !»

Clé 2. Étymologie.

L’origine du mot « Avent » est le latin ad-ventum qui signifie venue, arrivée, avènement.
Bien des mots français ont été construits sur la même racine de venir (‘ven-’) : advenir, avenir, survenir, contrevenir, convenir, devenir, parvenir, souvenir, sans oublier l’aventure, l’avènement, l’évènement, etc.
Cette venue, cette approche, ne peut être réduite au rappel d’ une attente vécue jadis, ni à la préparation d’un anniversaire de la naissance de Jésus.
En fait, l’annonce de cette venue demande, aujourd’hui, une réponse faite d’attente, d’ouverture, d’accueil.
(Notons ici que ceux qui s’appellent « Adventistes du 7ème jour » attendent un ‘avènement’ visible du Christ sur terre, le 7ème jour étant en observance du sabbat en vue du jugement.)

Clé 3. L’attente du Seigneur.

La Bible appelle souvent à une attente active de cette venue du Seigneur dans nos vies.
Diverses annonces ont entouré et éclairé la mission de Jésus :
le Messie (Luc 2,26; Jean 4,25), avec souvent une connotation de puissance, de gloire;
le Serviteur Souffrant (Isaïe 42,1-9…), cet envoyé de Dieu qui vient vivre la communion la plus profonde avec tout le peuple, et devient le Sauveur;
le Fils de l’Homme (Daniel 7,13-14), associé au jugement divin et à un monde nouveau…
Mais toujours, les prophètes exhortent chacun, du plus petit au plus grand, à se préparer à un bouleversement d’un certain « ordre établi ». Ils appellent dès lors à se convertir, à pratiquer le droit et la justice.
Il n’est pas difficile de voir que ce message garde toute son actualité !

Clé 4. Jean-Baptiste.

Souvent représenté dans nos églises, ce prophète est certainement une des figures-clés du temps de l’Avent.
Si on l’appelle le Précurseur, ce n’est pas parce qu’il aurait annoncé la naissance de Jésus (!), mais bien parce qu’avec lui, l’attente devient ouverture : c’est lui qui introduit la mission de Jésus. Intervenant au début du Nouveau Testament, « prêchant dans le désert », son souffle marque les premières pages des quatre évangiles, et tout particulièrement celui de saint Luc.

Plusieurs traits de Jean-Baptiste peuvent éclairer une vie d’ouverture au Seigneur.
– Lors de la Visitation de Marie à Elisabeth, le tressaillement de l’enfant dans le sein d’Elisabeth fait pressentir la venue du Seigneur (Lc 1,41.44).
– « Toi, petit enfant, qu’on nommera prophète du Très-Haut » (Lc 1,76) : l’amour de ses parents marque sa vocation, au sein d’une prière et au nom même de Dieu.
– « Convertissez-vous » (Mt 3,2) : son appel se fait très concret, incisif, au cœur du comportement de chacun (Lc 3,10-14) ; il annonce le Royaume, pour lequel il baptise Jésus (Mt 3,15).
– « Voici l’Agneau de Dieu » (Jn 1,26.29.36) : c’est par lui que les premiers disciples rencontrent Jésus; il révèle la présence au milieu de nous de celui que nous ne connaissons pas.
– « Il faut que lui grandisse et que moi, je diminue » (Jn 3,30) : il ne prend pas la place du Christ, mais s’en veut le serviteur.
– Il passe par le doute (Mt 11,2-3), et finalement paye sa fidélité à sa mission par le martyre (Mc 6,17-29).

Clé 5. Marie.

Au cœur de l’Avent, Marie est, par excellence, celle qui a ‘attendu’ et accueilli le Seigneur.
Mais il est bon de préciser qu’à sa suite, en Église, nous avons aussi cette mission, en communion les uns aux autres, d’accueillir et de mettre au monde Jésus, la Parole de Dieu. Chacun y ayant un rôle.

Voici quelques traits de Marie, selon l’évangile, qui peuvent aussi être de l’Eglise, hier, aujourd’hui et demain.
– « Comment cela se fera-t-il ? » (Lc 1,34) : la découverte de la mission confiée par Dieu n’exclut pas que des questions se posent, que l’on cherche à comprendre dans les conditions concrètes où l’on vit, tout en ayant l’assistance de l’Esprit Saint…
– « Voici la servante du Seigneur » (Lc 1,38) : la réponse de confiance et de disponibilité de Marie peut devenir notre propre réponse dans le service de Dieu et des hommes.
– « Mon âme exalte le Seigneur » (Lc 1,46-) : la prière de remerciement de Marie s’exprime lors de sa rencontre avec une autre croyante, Elisabeth, et cette prière est un grand acte de foi dans le royaume de Dieu qui se présente, un Royaume dont les valeurs sont différentes de celles du monde courant.
Marie garde ces choses et les médite en son cœur (Lc 2,19.51) : une attitude fondamentale du croyant qui prend le temps de revoir le cours des évènements, de les remettre en perspective et d’y déceler peu à peu la parole de Dieu. (Une étymologie du nom de Marie en hébreu renvoie au verbe voir : celle qui voit, en profondeur !)
– « Heureuse celle qui a cru la parole du Seigneur » dit Elisabeth à Marie (Lc 1,45), ce que Jésus lui-même élargit à tous les croyants (Lc 11,28).

Ces traits se retrouvent dans la prière de l’Angélus, sonnée trois fois par jour en certaines églises :
« L’ange du Seigneur annonce à Marie » et par l’Esprit, elle conçoit /
« Voici la servante du Seigneur » et l’acceptation dans la confiance /
« Et le Verbe s’est fait chair » et l’accueil parmi nous /
aboutissant à la vie nouvelle pour tous en union au Christ.

Clé 6. Liturgie.

La couleur du temps de l’Avent est le violet, comme pour le Carême ou pour les funérailles. Cette association ferait spontanément penser à un temps de tristesse. Mais, comme le fait remarquer Luc Aerens, dans la foi chrétienne, il s’agit en réalité chaque fois de célébrer liturgiquement le passage de la nuit vers la lumière !
A noter que, dans certaines églises, les ornements sont de couleur rose le 3ème dimanche de l’Avent. Ce violet atténué, ou plus lumineux, se veut signe de la joie d’avoir passé la moitié du chemin de Noël.

Des chrétiens orientaux, présents chez nous, vivent une période de Carême pour se préparer à accueillir Noël. (Il est bon de se rendre compte qu’un éventuel « gouter de Noël » organisé avant la fête tomberait donc pour eux en plein carême !) Les Italiens de Milan vivent le « carême de saint Martin » dès le 11 novembre.

Clé 7. Vivre l’Avent.

L’attente, c’est une disposition générale : être tendu, en éveil, à l’écoute, prêt à réagir, sur le qui-vive : c’est le contraire d’être installé, assoupi. On pourrait en rapprocher toute la spiritualité du désert.
Le temps de l’Avent serait alors le temps de purifier notre regard, pour que nous soyons capables de voir au-delà des apparences. C’est alors aussi un temps de recherche, qui peut être partagée.

L’ouverture s’ensuit, à la venue concrète, chaque jour, à la présence, que l’on célèbrera à Noël.
« Le Fils de l’Homme vient, ne le voyez-vous pas ? »
Il ne s’agit pas de « jouer », ni de faire « comme si » Jésus n’était pas encore né.
En réalité, en nous rappelant qu’il est venu, nous célébrons aussi qu’il vient et qu’il viendra.

L’accueil : lui faire place alors dans notre vie. C’est dans cette perspective que les évêques de Belgique proposent chaque année de vivre l’Avent sous le signe d’une opération « Vivre ensemble », pour oser l’ouverture et plus de justice, ici même, parmi nous.

« Voici que je me tiens à la porte, et je frappe.
Si quelqu’un ouvre,
j’entrerai chez lui… » (Apocalypse 3,20)

Christian Deduytschaever