Abus sexuels sur mineurs en 2020 – Rapport

 

Abus sexuels sur mineurs dans l’Eglise catholique en Belgique 2020

Les numéros et emails de contact se trouvent en fin d’article.

La problématique de la gestion des abus d’autorités, et des abus sexuels en particulier, est très importante pour l’Église. Le Pape François s’est exprimé encore très récemment sur le sujet, le présentant comme un « problème sérieux ».
A Bruxelles, une formation spécifique sera donnée en mars prochain.

Bref historique: Dix points de contact pour les victimes d’abus sexuels sur mineurs dans une relation pastorale ont été créés en janvier 2012, au sein de l’Église catholique en Belgique. L’objectif était de tout mettre en œuvre, en concertation explicite avec les victimes, en vue de mesures de réparation adéquates pour les infractions prescrites qui ne pouvaient plus être traitées par les tribunaux ordinaires.

Deux possibilités ont été mises sur pied à cet effet.  La première voie était celle de l’arbitrage, élaborée avec la pleine collaboration de l’Église, à la demande de la ‘Commission parlementaire spéciale pour le traitement des abus sexuels et des faits de pédophilie dans le cadre d’une relation d’autorité, en particulier au sein de l’Église’. Cette structure non ecclésiale permettait de garantir la sécurité nécessaire aux personnes qui ne faisaient plus confiance à une organisation de l’Église. D’autre part, celle des points de contacts. Dix points de contact ont été créés : un pour chacun des huit diocèses, un pour tous les ordres et congrégations religieuses francophones et un pour tous les ordres et congrégations religieuses néerlandophones.

Nombre de victimes enregistrées: Le Centre d’arbitrage, établi pour une durée limitée (2012-2015), a reçu 628 dossiers. Du côté des points de contact qui sont toujours accessibles, 553 plaintes ont été déposées entre 2012 et 2020. Les plaintes au Centre d’arbitrage ainsi que celle au niveau des points de contact ont fait l’objet d’un rapport détaillé en février 2019 (Abus sexuels sur mineurs dans une relation pastorale dans l’Église catholique en Belgique. Vers une politique cohérente. 1995-2017) également disponible sur le site web de l’Église (www.catho.be). En 2020, un rapport a été établi sur les plaintes déposées en 2018-2019. Ce rapport est lui-aussi disponible sur le site de l’Église de Belgique.

Le présent rapport donne un aperçu des plaintes aux points de contact en 2020. On dénombre 59 plaintes sur cette période, ce qui est beaucoup plus que pour la période 2016-2017 où seules 8 plaintes avaient été enregistrées et également beaucoup plus que pour la période 2018-19 où 64 plaintes avaient été enregistrées sur deux ans.

Lors de la création des points de contact, il a été convenu qu’une communication régulière sur les problèmes signalés serait faite aux médias et à la société. L’objectif est la poursuite d’une politique transparente, où rien n’est occulté et une invitation aux victimes du passé, qui souffrent encore en silence, à se manifester. Peut-être l’augmentation du nombre de plaintes en 2020 est-elle la conséquence de l’engagement répété de l’Eglise à offrir des mesures de réparation  même si elle a parfaitement conscience que cela ne peut réparer totalement l’injustice commise.

Que dire des plaintes de 2020 ? 35 plaintes (59 %) proviennent de la région néerlandophone, 7 de l’Archevêché de Malines-Bruxelles, (dont on ignore si elles proviennent de la région néerlandophone ou francophone), et 17 (27 %) de Wallonie. On constate donc une évolution par rapport aux 6 premières années, où il n’y avait que 18 % des plaintes provenant de Wallonie.

46 plaintes (78%) ont été déposées par la victime elle-même, 3 par des proches de celle-ci et 10 par d’autres instances. L’un des faits a été rapporté à la fois par l’abuseur et la victime. Ceci est un cas unique au cours des neuf années de fonctionnement.

45 victimes (70%) avaient plus de 40 ans au moment de la plainte et 16 victimes (27%) avaient plus de 60 ans. Trois victimes avaient moins de 18 ans au moment de la plainte et deux entre 18 et 20 ans. Neuf victimes avaient entre 20 et 40 ans au moment de la plainte. Dans un cas, la victime était décédée et la plainte a été déposée par une tierce personne. Ici encore, nous constatons une différence par rapport aux années précédentes où 84 % avaient plus de 40 ans et 35 % plus de 60 ans.

32 victimes (54%) sont des hommes et 27 sont des femmes. Les abuseurs étaient tous des hommes à l’exception de trois femmes. Ces dernières ne forment donc que 5% des abuseurs, ce qui correspond aux données de la plupart des années précédentes, à l’exception de 2018-2019 où une seule femme avaient été signalée comme abuseur.

35 victimes (59 %) avaient moins de 18 ans au moment de l’abus et 8 moins de 10 ans. Le rapport 2012-2017 comportait 92 % de victimes de moins de 18 ans.

Le rapport 2020 compte 19 victimes de plus de 21 ans au moment de l’abus (32%) . Le rapport de 2012-2017 en signalait 4% et celui de 2018-19, 20% (13 personnes).

36 des faits signalés (61 %) se sont produits il y a plus de 30 ans et 22 (31 %), il y a plus de 40 ans. 18 faits (30 %) remontent aux 20 dernières années. Ceci est un changement. Les rapports précédents comportaient moins de 8 % de faits remontant aux 20 dernières années.

Les plaintes comportant des données précises sur l’abuseur ( 48 des 59 plaintes), révèlent que plus de la moitié de ces derniers (54 %) étaient déjà décédés au moment de la plainte. L’âge des autres abuseurs au moment de la plainte, était le suivant : 3 moins de 40 ans, 7 entre 40 et 60 ans et 12 plus de 60 ans.

Dans 16 cas, les faits se sont produits dans une école et pour 18 autres, dans une paroisse. Pour 6 cas, l’abus s’est produit lorsqu’ils étaient acolytes; 1 abus s’est produit dans le secteur des soins. 13 victimes rapportent d’autres contextes divers.

Les plaintes pour comportement sexuel transgressif sont classées en quatre catégories. C’est sur base de cette classification qu’est déterminé le montant d’une éventuelle compensation financière.

10 plaintes ont été classées dans la catégorie 1 : attentats à la pudeur sans violence ni menace : compensation financière jusqu’à 2.500 euros maximum. Si la victime était âgée de moins de 16 ans révolus au moment des faits ou présentait une vulnérabilité particulière, la plainte relève de la catégorie 2.

27 plaintes ont été classées dans la catégorie 2 : attentat à la pudeur avec violence ou menace, ou avec une présomption de menace ou violence lorsque le mineur était âgé de moins de 16 ans au moment des faits ou manifestait une certaine vulnérabilité : compensation financière jusqu’à  5.000 euros maximum.

16 plaintes ont été classées dans la catégorie 3 : Viol avec pénétration sexuelle quelle qu’en soit la nature ou le moyen, perpétré sur un mineur d’âge sans son consentement ou avec présomption de non consentement si le mineur était âgé de moins de 16 ans au moment des premiers faits ou manifestait une certaine vulnérabilité : compensation financière jusqu’à 10.000 euros maximum.

4 plaintes ont été classées dans la catégorie 4 : Faits de la catégorie susmentionnée qui, vu leur gravité, leur longue durée ou les circonstances spéciales de l’abus sexuel doivent être considérés comme exceptionnels et qui ont conduit à un dommage extrême et manifeste dont le lien causal avec l’abus sexuel est prouvé : compensation financière jusqu’à 25.000 euros maximum .

Les victimes peuvent également souhaiter d’autres mesures que des mesures financières. Nombre de victimes ont exprimé plusieurs attentes ou des mesures de réparation multiples.  Deux attentes reviennent le plus fréquemment: la demande d’un entretien comme forme de reconnaissance (42 sur 59, soit 71%) et la demande de médiation entre la victime et le responsable actuel de la congrégation ou du diocèse auquel appartenait l’abuseur décédé au moment des faits (20 sur 59, soit 34%). Seules 3 personnes ont demandé à rencontrer l’abuseur. 30 personnes (50 %) ont demandé à rencontrer le responsable de l’abuseur. 11 dossiers ont été transmis aux autorités judiciaires parce que le caractère prescrit  n’était pas clair ou parce que l’auteur des faits encore en vie, pouvait présenter un risque. Un accompagnement supplémentaire a été proposé à plusieurs personnes.

Le faible taux de renvoi à la Justice provient du faible nombre d’infractions non prescrites selon les règles de la Justice. 61 % des cas concernent des infractions survenues il y a plus de 30 ans et la moitié des abuseurs étaient déjà décédés au moment de la plainte.

Lors de la rédaction du présent rapport (juillet 2021), 15 des 59 dossiers n’étaient pas encore finalisés. Une victime a mis fin au suivi avec le point de contact pendant le traitement du problème qu’elle avait signalé.

Une compensation financière a été versée pour 22 des 44 dossiers déjà clôturés. Les montants accordés sont les suivants : 2 personnes ont reçu entre 1.000 et 2.500 euros, 3 personnes entre 2.500 et 5.000 euros, 8 personnes entre 5.000 et 10.000 euros, 1 personne entre 10.000 et 15.000 euros, 7 personnes entre 20.000 et 25.000 euros et 1 personne au-delà de 25.000 euros.

Accueil des victimes dans le futur: À partir de 2021, les dix points de contact seront remplacés par deux points de contact pour les plaintes de comportements sexuels transgressifs dans le cadre d’une relation pastorale, l’un pour les diocèses et congrégations francophones et l’autre pour les diocèses et congrégations néerlandophones.

Les points de contact francophone et néerlandophone seront chacun composés de collaborateurs sous la conduite d’un coordinateur, avec diverses expériences professionnelles dans les soins de santé mentale, dans le monde juridique et canonique et dans les services sociaux. Les diocèses et les Unions des congrégations et ordres religieux ont chacun un représentant au sein du point de contact unique.

Les membres du point de contact unique pour les plaintes de comportements sexuels transgressifs dans le cadre d’une relation pastorale, travaillent ensemble dans un contexte multidisciplinaire. Ils sont liés par les règles du secret professionnel. Ils accomplissent leur fonction indépendamment de l’Évêque ou du Supérieur religieux concerné.

Le point de contact pour les plaintes de comportements sexuels transgressifs dans le cadre d’une relation pastorale, peut aussi toujours faire appel au Président (le Professeur Dr Manu Keirse) et au Secrétaire (Mgr Herman Cosijns) de la Fondation Dignity, une Fondation d’utilité publique créée pour représenter l’Église (les Évêques et les Supérieurs Majeurs des congrégations et ordres religieux), dans les dossiers de comportement sexuel transgressif dans un contexte pastoral. Cette dernière, peut faire des propositions de mesures de réparations appropriées au nom de l’Église, toujours du point de vue des victimes, bien sûr.

Liés au point de contact unique, chaque diocèse et les Unions des congrégations et ordres religieux, disposent d’une antenne locale pour les plaintes de comportement sexuel transgressif à l’égard de mineurs et de personnes vulnérables, dans un contexte pastoral. Chaque antenne locale est constituée d’une personne de contact avec un ou plusieurs collaborateurs. Elle agit toujours en concertation étroite avec le point de contact unique.

Toute personne, quel que soit son âge, victime, récemment ou dans le passé, d’abus sexuel ou

de comportement transgressif dans une relation pastorale, peut s’adresser au point de contact

unique. Cette possibilité s’applique également à ceux qui ont été témoins, abuseurs ou soupçonnés d’abus sexuels ou de comportements transgressifs dans une relation pastorale.

Toute personne qui a connaissance ou un soupçon raisonnable de tels faits peut aussi s’adresser au point de contact.

La plainte peut porter sur des faits, des comportements ou des déclarations répréhensibles, ainsi

que sur la manière dont les responsables ecclésiaux les ont traités. Il peut s’agir de faits prescrits

ou non. Cela peut aussi concerner des faits dont la victime ou l’abuseur est déjà décédé.

Nous conseillons aux victimes qui n’ont pas encore été reconnues de se manifester. Certaines choisissent parfois de se taire très longtemps afin de survivre ou de ne pas alourdir leurs relations. Mais le silence peut devenir dévastateur quand il refoule ce qui doit être révélé en vue d’une reconstruction et d’une possible guérison.

 

 


Comment contacter le point d’info central et/ou une antenne locale ?

Le point d’info central est joignable :

  • au 02 507 05 93
  • ou via email: info.abus@catho.be  pour les francophones
  • et via info.misbruik@kerknet.be pour les néerlandophones.

Les antennes locales sont mentionnées ci-dessous et consultables sur Internet sur Catho, sur Kerknet ainsi que les sites diocésains :

  • pointdecontactabus.malines-bruxelles@catho.be
  • pointdecontactabus.coreb@catho.be (pour la Conférence des Religieuses/religieux en Belgique (COREB))
  • aanspreekpuntmisbruik.urv@kerknet.be (voor de Nederlandstalige religieuzen)

Les évêques référendaires : mgr Guy Harpigny et mgr Johan Bonny


SIPI, Bruxelles, lundi 13 septembre 2021