Message du cardinal Jozef De Kesel – Pâques en Carême

C’est devenu un fort long Carême, avec d’amples restrictions. Beaucoup de nos contemporains les ont perçues comme une atteinte à leur liberté.

« Mais qu’est-ce que la liberté et que nous enseigne la coronapandémie ? », demande le Cardinal Jozef De Kesel dans sa lettre de Pâques publiée cette semaine dans Dimanche.

Le temps du joue les prolongations, relève le . Il n’empêche que nous pouvons porter la Bonne Nouvelle de la résurrection du Christ. Tant qu’à être confinés, l’archevêque nous invite à nous plonger dans la prière à l’écoute de la Parole de Dieu pour mieux encore agir en chrétiens responsables.

(c) archidiocèse Malines-Bruxelles

« Tant les restrictions que nous nous imposons que celles que nous rencontrons sans le vouloir, ne sont pas nécessairement là pour mettre notre liberté en question.  Au contraire. Elles peuvent justement lui donner son vrai sens. C’est la signification profonde du Carême: accueillir notre vulnérabilité et apprendre à vivre avec des limites. » Jozef De Kesel

Chers amis, le mercredi des Cendres, nous avons entamé notre Carême, afin de nous préparer aux fêtes pascales. Nous avons accueilli ce temps au cours duquel nous nous imposons certaines restrictions, afin de mieux comprendre ce qui compte vraiment et ce que signifie de vivre en conformité avec l’Evangile. Le Carême, cette année, a été très particulier. Il avait d’ailleurs commencé bien plus tôt… en réalité déjà autour de l’an dernier ! C’est donc devenu un fort long Carême, avec d’amples restrictions que nous n’avons pas choisies. C’est aussi la raison pour laquelle beaucoup de nos contemporains les ont perçues comme une atteinte à leur liberté.

Mais qu’est-ce que la liberté ? Si la pandémie nous a bien appris quelque chose, c’est que nous sommes des êtres fragiles et vulnérables. Il serait illusoire d’estimer la fécondité d’une vie uniquement lorsque je puis tout faire ce que je veux, sans aucune limite et sans tenir compte des autres. Notre liberté n’est pas absolue. Il n’y a de vie vraiment humaine et féconde que lorsqu’on reconnaît notre fragilité et notre vulnérabilité. C’est souvent dans la rencontre de personnes avec un handicap ou une déficience permanente que nous découvrons ce qu’est l’humain en vérité. Dieu lui-même a voulu partager avec nous cette vulnérabilité. C’est ainsi et pas autrement qu’il s’est fait homme.

 

Même si notre Carême se prolonge, la lumière de Pâques vient illuminer notre cheminement

Vivre avec des restrictions

Tant les restrictions que nous nous imposons que celles que nous rencontrons sans le vouloir, ne sont pas nécessairement là pour mettre notre liberté en question.  Au contraire. Elles peuvent justement lui donner son vrai sens. C’est la signification profonde du Carême: accueillir notre vulnérabilité et apprendre à vivre avec des limites. Il va de soi que nous devons tout faire pour arrêter la propagation du virus. Mais il ne nous est pas demandé de rester passivement en attente ou de nous préoccuper à retourner aussi vite que possible à « la normale ». Car cette époque de transition, avec toutes ses peines et ses manques, est aussi « un temps favorable, un temps de grâce » (2 Co 6,2). Il peut nous ouvrir les yeux sur ce qui, par la routine de la vie « normale« , menaçait d’être oublié.

C’est aussi dans nos communautés chrétiennes que nous sommes obligés de vivre avec des restrictions exigeantes. Les rassemblements ne sont possibles que moyennant des conditions très strictes. Il en va ainsi pour l’Eucharistie: c’est un manque qui nous fait mal. Mais cela nous rappelle précisément la grande valeur de la prière. La prière à la maison ou en petit groupe et surtout la prière personnelle et l’écoute  priante de la Parole de Dieu, qui sont essentielles pour la vie du chrétien.

Nous éprouvons aussi des entraves dans nos contacts. Nous devons respecter une distance physique. Mais cela ne signifie pas que nous nous séparons, pour prendre chacun son propre chemin. Bien au contraire! La pandémie représente un vaste appel à la solidarité. La solidarité ne connaît pas de limites. C’est précisément parce que nous sommes limités, que des gestes d’attention aux autres, même les plus petits, peuvent faire des miracles. La solidarité fait partie avec la prière du cœur de notre foi.

Un temps favorable

Pâques signifie normalement la fin du Carême. Cette année-ci, le Carême se prolongera quelque peu. Quand donc se clôturera-t-il ? Pâques se retrouve au milieu du Carême ! Les règles en vigueur nous empêcheront de célébrer la fête de Pâques avec tout le faste habituel. Mais cela ne pourrait nous décourager. Le Seigneur est vraiment ressuscité. Il peut faire de la période que nous vivons un temps favorable, un temps de grâce.

Il n’y a pas de véritable humanité, pas d’authentique vivre ensemble, sans la reconnaissance de notre fragilité et de nos limites. Pas de Pâques sans Carême. Pas de Résurrection sans la Croix. Ce que nous éprouvons est déjà empreint de joie pascale. Les restrictions qui impactent aussi la vie en Eglise, sont une invitation à approfondir notre foi par l’écoute priante de la Parole de Dieu et par la solidarité. Elles nous aident à devenir de bons disciples du Christ et, précisément pour cette raison, aussi des citoyens responsables dans la société. C’est en ce sens que je vous souhaite une joyeuse fête de Pâques !

Cardinal Jozef De Kesel, Archevêque de Malines-Bruxelles

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