Retour sur la conférence du 23 mai 2023 : « Les origines de l’Ommegang de Bruxelles et l’église Notre-Dame au Sablon »

                                                                                                                                         

 

 

 

 

 

 

 

Retour sur la conférence du 23 mai 2023 :

« Les origines de l’Ommegang de Bruxelles et l’église Notre-Dame au Sablon »

Église Notre-Dame des Victoires au Sablon

par

le Marquis de Trazegnies

Président de la Société Royale de l’Ommegang de Bruxelles

 

Près de 140 personnes ont assisté ce mardi soir, 23 mai, à la conférence donnée par le Marquis de Trazegnies dans l’église Notre-Dame des Victoires au Sablon.

Pendant des années, le Marquis de Trazegnies incarna Charles Quint lors de ce cortège prestigieux qui prend, chaque année, son départ de l’église du Sablon.

 

L’Ommegang, qui signifie littéralement « aller autour« , est une procession qui trouve ses origines dans les Pays-Bas méridionaux.

Elle remonte à une dévotion du XIVe siècle et est liée au miracle de Notre-Dame du Sablon.

En 1304, la mère supérieure de l’Hôpital Saint-Jean céda au Grand Serment des arbalétriers une partie du terrain que l’hôpital possédait au Sablon pour y construire une petite chapelle dédiée à la Vierge Marie

 

Béatrice Soetkens, jeune femme anversoise, assista à une apparition de la Vierge Marie, qui lui demanda de transporter une statue à son effigie d’Anvers à Bruxelles. En 1348, Béatrice se rendit donc à la collégiale d’Anvers pour s’emparer de la statue. Le sacristain s’y opposa, mais un souffle divin le paralysa sur place. Béatrice remonta la Senne en barque avec son mari, batelier, mais le vent tomba brusquement, alors que les Anversois, furieux, s’étaient lancés à leur poursuite. Béatrice se mit alors à prier avec ferveur et le couple s’en sortit miraculeusement. Béatrice et son mari furent finalement reçus à Bruxelles par Jean III de Brabant et la guilde des arbalétriers qui les aidèrent à installer la statue de la Vierge dans la chapelle du Sablon. 

L’arrivée de cette Vierge en 1348 marqua le début d’un véritable culte marial et la procession de l’Ommegang naquit dans cette atmosphère. 

La renommée de cette statue attira les dévots et grâce aux offrandes qui affluèrent, les arbalétriers construisirent au XVe siècle la nouvelle église Notre-Dame au Sablon.

Depuis lors, cette procession s’est sécularisée et l’Ommegang que nous reconstituons aujourd’hui est celui qui fut donné en l’honneur de Charles Quint le 2 juin 1549

Un peu d’histoire …

Charles Quint, l’un des monarques les plus puissants de l’histoire européenne, assistait régulièrement à la procession de l’Ommegang à Bruxelles. En tant qu’empereur du Saint-Empire romain germanique, son règne de 1519 à 1556 marqua l’apogée de la puissance de l’Empire espagnol et de la Maison de Habsbourg. Charles Quint utilisait cette procession pour affirmer sa puissance et sa légitimité en tant que souverain, en se présentant aux côtés de la noblesse et des dignitaires ecclésiastiques.

La procession de l’Ommegang était un spectacle grandiose, avec des défilés de chars décorés, des représentations théâtrales et des reconstitutions historiques. Elle était également l’occasion pour Charles Quint de rencontrer des dirigeants étrangers et de renforcer les alliances politiques.

Pendant son règne, Charles Quint dut faire face à des défis politiques, notamment les tensions religieuses causées par la Réforme protestante. Il mena une lutte contre les protestants et chercha à maintenir l’unité de son empire face aux aspirations nationalistes des régions.

Ferdinand

En 1531, Charles Quint fit de son frère cadet, Ferdinand, son homme de confiance et le nomma roi des romains, c’est-à-dire futur empereur. Ferdinand épousa Anne Jagellon, future reine de Hongrie et de Bohême et gérait l’Empire en l’absence de son frère.

Après la bataille de Muehlberg (1547), Charles Quint convoqua une diète à Augsbourg pour établir le statut juridique des protestants dans le Saint-Empire. Cependant, ces derniers s’y opposèrent avec fermeté, étant trop attachés à leur liberté. En même temps, Charles Quint assura l’intérim d’Augsbourg pour la partie religieuse et retira les Pays-Bas, qu’il affectionnait particulièrement, de l’Empire romain germanique.

L’année suivante, Charles Quint accorda aux Pays-Bas une seule règle de succession. Certaines familles, dont la famille de Saxe, se divisait en de nombreuses ramifications, leurs territoires étaient de plus en plus morcelés et l’Empire finissait par les perdre. Pour éviter ce problème, Charles Quint promulgua, en 1549, la pragmatique sanction, en unifiant les règles de succession.

Philippe II

La première des diètes d’Empire à Augsbourg se déroula en 1530. Ces assemblées réunissaient les divers chefs du Saint-Empire romain germanique et étaient de grande importance dans les guerres de religion des XVe et XVIe siècles. Lors d’une de ces diètes, Charles Quint demanda à son frère Ferdinand d’abandonner le titre de roi des Romains et d’abdiquer en faveur de son fils Philippe. Ferdinand refusa et la majorité des chefs du Saint-Empire romain germanique se prononcèrent en faveur de Ferdinand. La famille se divisa alors en deux branches : celle des Habsbourg d’Autriche et celle des Habsbourg d’Espagne.

Mary Tudor

En 1553, Charles Quint réalisa son dernier coup de maître en mariant son fils Philippe à Mary Tudor d’Angleterre. Pour que le mari ait le même statut que l’épouse au moment du mariage, Charles Quint nomma Philippe, roi de Naples et roi de Jérusalem. Malheureusement, sa stratégie échoua, car Mary Tudor mourut à peine deux mois après lui, laissant Philippe sans héritier.

 

 

Ommegang du 2 juin 1549

En 1549, Charles Quint arriva à Bruxelles avec son fils, Philippe II. Timide et renfermé, Philippe avait été éduqué en Espagne. Il n’était pas du tout habitué aux familiarités de cette noblesse qu’il trouvait désagréable. Lors de cette tournée de deux ans dans les grandes villes du nord et du sud des Pays-Bas, Philippe II ne parvint pas à s’imposer, contrairement à son oncle Ferdinand parfaitement intégré en Allemagne et en Autriche.

Futur roi et successeur de Charles Quint, Philippe II eut toutefois droit à toutes les attentions et tous les honneurs. Chaque ville s’investissant pour dévoiler son meilleur côté, les autorités de Bruxelles décidèrent de montrer la richesse et la gloire de leur ville, en offrant à l’homme qui dominait l’Europe et l’Amérique un Ommegang plus resplendissant que jamais le 2 juin 1549.

Les corporations, les serments, le patriciat de Bruxelles ainsi que la noblesse de nos régions et le haut clergé défilèrent donc en faisant montre d’un faste qui devait tailler dans le marbre leur statut privilégié, tout en rehaussant la grandeur de l’empereur.

 

Et de nos jours ?

De nos jours, l’Ommegang se veut une reconstitution traditionnelle, respectueuse des leçons de l’histoire, mais aussi un extraordinaire spectacle de féerie lumineuse et sonore où interviennent des techniques numériques. Si la cour tente de rassembler les descendants des illustres familles dont elle était composée au XVIe siècle, le spectacle qui lui est offert est un éblouissement de groupes folkloriques, de cavaliers, de drapeaux, d’échasseurs, de marionnettes, de géants et de chars, soit la force vive de la ville avec ses chants, ses danses, sa dévotion profonde et cette drôlerie – parfois surréaliste – qui frappent si fortement l’esprit des chroniqueurs. Aucun peuple d’Europe n’était à l’époque plus prospère ni plus follement imaginatif que celui de nos provinces.

Ce cortège impressionnant illustre plusieurs aspects de notre folklore national et séduit par une forme de magie visuelle ainsi que par de nombreuses animations.

Quelque 1400 participants en costumes éblouissants évoquent dans la capitale des Pays-d’en-Bas la présentation de Charles Quint et de son fils, l’infant Philippe (futur Philippe II). L’Ommegang révèle chaque année des détails insoupçonnés de l’histoire de Bruxelles.

Quelques milliers de places assises permettent au public contemporain de s’immerger dans la liesse et dans la splendeur d’une manifestation historique grandiose qui, seule, peut rivaliser avec le Palio de Sienne.

En 2023, l’Ommegang aura lieu le 28 et le 30 juillet. Plus d’infos ici.

 

 

Lien vers quelques photos supplémentaires de la conférence au Sablon

 

Nicole Hertoghs