Célébration d’envoi du Synode | Cardinal De Kesel : « C’est la fraternité qui évangélise »

Le 4 juin dernier à la Basilique de Koekelberg, 1200 personnes se sont réunies pour fêter la fin de la phase de consultation du Synode 2021-2023 (découvrir le reportage). La célébration était présidée par le Cardinal De Kesel qui nous a proposé une homélie très inspirante. La voici dans son intégralité:

 

C’est la fraternité qui évangélise

Frères et sœurs,

Nous venons d’entendre la fin de l’évangile selon saint Matthieu (Mt.28,16-20). Ce sont dans cet évangile aussi les dernières paroles de Jésus à ces disciples. Sa toute dernière parole est une promesse : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ». Sa présence ne sera plus limité dans le temps et l’espace. Ressuscité, élevé à la droite de Dieu, tout pouvoir lui a été donné « au ciel et sur la terre ». Et voilà qu’il constitue ses disciples comme témoins de sa présence et de la force de l’Esprit qui donne la vie.

Témoin, disciple et missionaire

Il faudra toujours des témoins, jusqu’à la fin du monde. D’où la mission qu’ils reçoivent : « De toutes les nations faites des disciples. » Comprenons bien ces paroles. Jésus ne les envoie pas à la conquête du monde. Il ne demande pas de faire de toutes les nations des nations chrétiennes. Nous connaissons aujourd’hui mieux que jamais le danger d’un nationalisme chrétien. Ce ne sont pas des nations qui sont chrétiennes. Ce qui importe c’est qu’il y aient dans toutes les nations des témoins de l’Evangile. Ce n’est pas leur nombre qui importe mais leur présence et leur témoignage.

Une présence qui rayonne et qui témoigne de l’amour de Dieu pour toute sa création. Aucun pays, aucune langue, aucun lieu n’est exclu. Jusque dans les périphéries aussi bien géographiques qu’existentielles. Particulièrement là où l’humanité de l’homme est menacée. D’aucun lieu ou d’aucune situation on pourra dire : ici l’Evangile n’a rien à dire ni rien à porter. Une présence universelle, une présence qui n’exclut personne.

Nous aussi, nous sommes des disciples missionnaires. La mission est notre raison d’être. Si le Pape François nous a invité à prendre le chemin synodal, c’est en vue de cette mission. L’Eglise n’est pas un club où la convivialité est en but en soi. L’Eglise est une communauté ouverte et accueillante. Et donc une Eglise missionnaire. Mais pas de n’importe quelle façon. On ne peut pas annoncer l’Evangile avec des moyens qui ne lui conviennent pas. Jamais dans un esprit de conquête, jamais dans uns un désir d’être les plus nombreux. Mais toujours dans le plus grand respect de l’autre et de sa liberté. L’autre n’est jamais l’objet de notre pastorale mais toujours, qui qu’il soit, notre frère ou sœur en humanité. Ce n’est que dans cet esprit de fraternité et d’humanité que nous pouvons témoigner de l’Evangile. Comme saint Charles de Foucauld, qui vient d’être canonisé, l’ a vécu de façon si radicale mais aussi de façon si authentique.

Encore un long chemin à faire

Bien sûr nous espérons que ce chemin synodal et le synode de l’an prochain apporteront des fruits et que les décisions nécessaires seront prises. Mais il ne s’agit pas seulement d’un style de gouvernement plus synodal. Il s’agit de devenir nous tous et toutes un Eglise synodale. Pas en deux ans. C’est un chemin. Un chemin qu’on avait déjà commencé. Mais un chemin sur lequel, grâce à l’appel du Pape, nous avons fait un pas en avant. Simplement déjà par le fait que cet appel a été si bien accueilli, ici aussi à Bruxelles. Mgr Kockerols et moi, nous vous en sommes si reconnaissant. Mais un pas en avant aussi parce qu’on a pu s’exprimer et qu’on a été écouté. Car l’écoute a été au centre de ce chemin synodal. Cette écoute est vraiment aujourd’hui de toute première importance. S’écouter mutuellement et écouter ensemble la Parole de Dieu pour discerner ce que l’Esprit dit à l’Eglise.

Nous ne sommes pas venus ici pour clôturer le chemin synodal. Nous avons encore un long chemin à faire. Nous devons résister à la tentation du cléricalisme pour devenir une Eglise plus fraternelle. C’est cette fraternité qui est au cœur du chemin synodal. Et ce n’est une Eglise fraternelle qui peut témoigner de l’Evangile. Ne l’oublions pas : c’est la mission qui est le sens ultime de la synodalité. C’est la conviction du pape François : seule une Eglise fraternelle et synodale sera missionnaire. Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons répondre aux défis de notre temps. On peut disposer de toutes les structures nécessaires et les rendre plus efficaces et même plus synodales, si nous manque cette cet esprit de fraternité, cette réforme ne servira à rien.

L’exemple de Charles de Foucauld

Le chemin déjà parcouru nous a montré l’unité mais aussi la diversité qui règne entre nous. Nous n’avons pas tous et toutes la même spiritualité ni les mêmes options. Mais voilà ce que nous avons expérimenté : le respect de l’autre, l’écoute et l’échange sincère. Reconnaître l’autre et l’aimer précisément comme, lui aussi, un disciple du Christ. C’est cette fraternité qui évangélise. Charles de Foucauld qui vient d’être canonisé, l’a vécu de façon si exemplaire. Ce n’est pas tant par l’annonce explicite mais d’abord par une fraternité vécue qu’il a été un si grand témoin de l’Evangile. Cette mission n’est pas confiée à quelques-uns d’entre nous ni seulement aux ministres ordonnés, mais à nous tous et toutes. Cette fraternité et cette synodalité, nous ne pouvons la vivre qu’ensemble. C’est d’ailleurs le grand commandement que le Seigneur nous a laissé : de nous aimer les uns autres comme Lui nous a aimés. C’est à cela, a-t-il dit, qu’on nous reconnaîtra comme ses disciples. C’est par cet amour et cette fraternité qu’Il veut se faire connaître. C’est cette fraternité qui témoigne de la pertinence de l’Evangile. C’est par cette fraternité que nous sommes envoyés en mission.

+ Jozef De Kesel

(Le titre et les sous-titres ont été rajoutés)